lundi 7 novembre 2016

Le Mont Ventoux...

... par Bédoin :

Samedi 24 septembre, je veux partir tôt, quitte à commencer de nuit, alors réveil à 6h, et départ effectif à 7h10.

Il ne fait pas très chaud : 7°. Les premiers kilomètres après Bédoin sont assez faciles, 3km à 3% puis 4km à 6% max. Tout cela est bien progressif et permet de s'échauffer avant le vrai début de l'ascension. A Saint-Estève, on rentre dans la forêt et dans les gros pourcentages. 9km à au moins 9%, parfois plus, sans aucun répit. La route est assez étroite, de loin on pourrait penser que ce n'est pas très abrupte, mais quand on est dedans on a l'impression que la route est tracée directement face à la pente. Ce versant est la montée empruntée par le Tour de France, et le bitume est recouvert d'inscriptions en tous genres, des plus classiques aux plus farfelues. A aucun moment on n'aperçoit le sommet, et cela me convient parfaitement car je le sais encore très loin. C'est difficile mais régulier, la petite route est magnifique, et je trouve facilement un rythme qui me permet de progresser sans trop me mettre dans le rouge, ce qui est indispensable si je veux enchaîner avec les autres ascensions plus tard. C'est là que ça se joue... si j'arrive à passer ce versant le plus difficile sans trop puiser dans mes réserves, le défi des Cinglés sera tout d'un coup plus réalisable. Donc je patiente, je ne regarde pas le compteur, ni les bornes kilométriques le long de la route. D'ailleurs il en manque quelques-unes, j'ai lu qu'elles sont souvent volées. Même en partant tôt je m'attendais à voir plus de monde pour un samedi : alors que j'arrive au Chalet Reynard, je n'ai dépassé que trois Hollandais, et personne ne m'a rattrapé.


Jusqu'au sommet il reste 6-7km, les plus connus, à découvert dans la partie "lunaire". Coup de chance, il n'y a pas de vent. Cette fois la vue sur le sommet apparait à chaque virage à droite, et on peut imaginer et compter le nombre de lacets restants avant d'y arriver. Je suis encore bien frais, ça passe bien, malgré quelques centaines de mètres bien difficiles sur la fin. Le sommet ! Je suis le seul vélo en haut, et c'est bien sympa.


La température est montée à 10°, mais je sens déjà que la descente va être fraîche. Buff sous casque, manchettes, veste coupe-vent, et c'est parti. Une horreur cette descente vers Malaucène. Déjà le haut, assez aérien quand on roule à droite, ne me rassure pas avec mon "presque" vertige. Deux, la route de cette face Nord est encore souvent humide. Trois, ma roue arrière émet par moments d'inquiétants bruits d'engrenages en mauvaise santé. Quatre, je ne suis pas un fan de vitesse sur route et j'ai du mal à dépasser les 60km/h... du coup je suis tout le temps sur les freins. Pas vraiment crispé sur le vélo, juste un excès de prudence je pense. Bref, je me traine et je prends froid. Dans la descente, je croise un nombre impressionnant de Hollandais tous avec un maillot identique, au moins 60 ou 70 ! A toutes sortes d'allures et avec toutes sortes de vélos. J'arrive à Malaucène grelottant de froid. Bien. Ma roue libre ne fait plus aucun bruit depuis la deuxième moitié de la descente, mais bon puisqu'il y a des magasins de vélos partout, autant demander un avis. Autant mes VTT je les ai tous montés quasiment pièce par pièce, autant le route je n'y touche jamais et je ne suis pas du tout familier avec ses composants. Petite pause d'une demi-heure chez Ventoux Bikes, accueil très sympa, le mécano m'arrange ça. Puis ensuite le plein des bidons, tout ceci me fait perdre pas mal de temps mais après tout c'est pour pallier à ce genre d'imprévu que je suis parti tôt.

... par Malaucène :

Et c'est reparti pour la deuxième ascension du jour. Le début est assez roulant, je dépasse quelques Hollandais avec le fameux maillot et ils me disent qu'ils font toutes ces ascensions pour une association. Un autre Hollandais me dépasse et on roule un moment ensemble. Il me dit qu'il est aussi dans les trois ascensions, dans le même ordre que moi. Mais il va un peu plus vite et je dois le laisser filer, je sais que le plus dur reste à venir. Car malgré les secteurs de récupération avant et après, le milieu de la montée est terrible : 5km à 10% de moyenne, et bien au-delà par moments. Je n'ai pas beaucoup d'expérience de montées de cols, mais je connais ce pallier en ce qui me concerne : à 9% ça va, je peux gérer, mais d'un coup à 10% ça devient quasi impossible. C'est aussi à ce moment que je commence à fatiguer des efforts précédents. Je suis à l'arrêt ! En fait cette montée irrégulière est terrible : route large, de longues lignes droites, certes des belles vues dégagées la plupart du temps, mais du coup on voit le sommet de très très loin. Le bas assez roulant qui use puis d'un coup on est dans un mur. Je m'arrête une ou deux fois pour détendre un peu les jambes. Je sais que mentalement c'est le moment le plus important de la journée. Si je passe c'est quasi gagné pour le défi. Je m'accroche et gros soulagement sur le petit replat en arrivant au Chalet Liotard. Petite pause et ça repart.


Bon en fait, juste après le Chalet je pense que ce sont les plus gros pourcentages, mais la route semble rendre beaucoup mieux et à partir de l'épingle gauche très serrée la pente s'adoucit légèrement. Pas grand chose, mais juste assez pour redonner le moral. Les deux derniers kilomètres sont à nouveau assez difficiles, mais on y est, c'est bon. Par contre j'ai très froid, même dans la montée, mélange de vent/fatigue/faim. Du coup je m'arrête encore pour me couvrir à 500m du sommet, en espérant ainsi couvert me réchauffer suffisamment avant d'entamer la descente. Cela fonctionne pas trop mal. Au sommet il y a maintenant foule et je ne m'attarde pas. Je retrouve mon Hollandais qui me dit qu'il attend un collègue à lui avant de redescendre vers Sault. Ok, et bien à tout à l'heure, moi je vais manger.


Je redescends donc la partie "lunaire", puis au Chalet Reynard direction Sault. Tout de suite je me rends compte comme prévu que toute cette partie est beaucoup moins pentue. En effet, il faut souvent relancer et pédaler sur cette petite route qui serpente dans la forêt. Belle descente, on n'est pas trop sur les freins. Ceci dit je dois m'arrêter une fois au milieu, un patin de frein s'est décalé et frotte contre le pneu. Pas de dommages, un coup de clé et c'est reparti. Une fois en bas il faut remonter légèrement pour atteindre le centre de Sault, ses terrasses et ses restaurants. Il doit être presque 14h et j'ai bien mérité un bon plat du jour.

... par Sault :

Je n'ai pas pris d'antivol pour le vélo et je reste donc en terrasse, bon il ne fait pas froid, environ 18° je crois, mais j'ai du mal à me réchauffer, gros manque de calories ! Du coup je ne traîne pas trop une fois mon assiette engloutie. J'ai l'habitude de digérer sur le vélo, et je suis impatient de repartir sur cette dernière ascension car la météo semble tourner. En repartant je croise mon Hollandais qui me lance un "bonne chance !". Cette dernière montée est très sympa. Petite route en parfait état, qui serpente dans une jolie forêt, avec souvent de jolies vues. Champs de lavande sur le bas, coupée, mais on sent l'odeur quand même.


Et puis c'est désert. Juste quelques vélos. Quand même plusieurs motards dont quelques-uns très dangereux, faut rester vigilant et s'arranger pour ne pas se faire dépasser en plein virage aveugle, ce qui est un peu pénible. Mais sinon ça passe bien, comptez une vingtaine de kilomètres jusqu'au Chalet Reynard, à pas plus de 6% et plusieurs paliers de récupération. Mais la fatigue est là, et je suis à mon maximum, c'est-à-dire pas bien vite. Content d'arriver au Chalet Reynard, je suis clairement sur la réserve depuis un moment, mais je suis confiant pour le final, que j'ai monté le matin en venant de Bédoin. Mais en fait, autant de Bédoin c'est la partie la moins difficile, autant en venant de Sault ça fait très très mal de se reprendre du 9% et plus dans les pattes. Dur dur de retrouver le coup de pédale et d'ailleurs je ne le retrouverai jamais. Après le premier lacet au-dessus du Chalet Reynard, surprise, le sommet est dans les nuages et on dirait même qu'il pleut là-haut !



Bon, de toutes façons j'y vais, ça c'est sûr. En fait, le temps d'arriver en haut, ça se dégage progressivement. Je renouvelle ma tactique de me rhabiller cinq minutes avant le sommet pour me réchauffer avant la bascule, au niveau d'un des photographes. La route est mouillée alors je lui demande si c'est tombé fort, il me dit qu'une heure plus tôt c'était de la grêle ! Bon, j'ai bien fait de pas trop me dépêcher.



Allez, je rejoins une dernière fois le sommet, complètement noyé dans le brouillard, on voit pas à dix mètres. Il n'y a pas grand monde, j'en profite pour une photo contre la pancarte. Et une dernière descente, cette fois vers Bédoin pour rentrer à la douche et au camping.



.... et pour finir,

141km, 4520m de D+, pour 8h05 de roulage. Le défi des Cinglés du Ventoux est relevé !
Super content car cela faisait un moment que je voulais rouler là-bas, c'est fait et j'en ai profité un maximum. Finalement, en gérant bien, cela reste assez raisonnable. Il faut juste être bien motivé, partir tôt, et pas trop vite, ne pas se cramer dans la première ascension. Les paysages sont magnifiques et très variés, et puis comme la météo change très vite là-bas, ça diversifie encore plus les ambiances et les conditions. En espérant vous avoir donné envie d'y aller !


5 commentaires:

Papa a dit…

Bravo.
Papa.

Laurent a dit…

Bonsoir,
Tout d'abord, bravo.
Pour l'avoir fait il y a quelques années cette épreuve est vraiement géniale.
Cette année j'ai fait 4 montée et 2.5 montées de nuit. Là encore une expérience que je conseille. Si tu en as l'occasion saute dessus c'est particulier mais très agréable...
Laurent

douesque a dit…

10 monts Valérien, 3 monts Ventoux, où t'arrêteras-tu :))))

Oli a dit…

merci tout le monde !

laurent : jamais vraiment testé le vélo route de nuit (sauf longchamp), ça doit être quelque chose là-haut ! surtout avec les levers/couchers de soleil.
sylvain : je crois que c'était 12 Valérien :-)

MAMAN a dit…


BRAVO!
Je suis fière de toi..
Mam